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— Serait-il en péril ?

— En danger de mort.

Demonios ! hurla le sergent, sauvons-le !

— Je viens exprès pour cela, mais parlez bas.

— Je parlerai comme vous voudrez, pourtant dites-moi…

— Rien ! interrompit don Pedro, il n’y a pas un instant à perdre.

— Que faire ?

— Écoutez bien.

— Je suis tout oreilles.

— Un détachement simulera une attaque à la porte par laquelle est entré le général, un autre surveillera les environs ; les Cœurs sombres ont des chemins connus d’eux seuls, vous, avec le troisième détachement vous me suivrez, je me charge de vous introduire dans la maison, est-ce convenu ?

— Je le crois bien.

— Alors, hâtez-vous de prévenir vos collègues, le temps presse.

— J’y cours, où vous trouverai-je ?

— Ici.

— Bon ! je ne vous demande que cinq minutes.

Et il s’éloigna à grands pas.

— Hum ! pensa don Pedro dès qu’il fut seul, il faut être prudent, quand on veut que les affaires rapportent ; d’après ce qu’ils disent, ils veulent juger le général, ne les laissons pas aller jusque-là, mes intérêts souffriraient trop ; j’ai assez bien manœuvré pour être à l’abri de tous les soupçons, si je réussis je serai plus en faveur que jamais auprès du général, sans rien perdre de la confiance que me témoignent les conspirateurs.

Diego revenait.

— Eh bien ? lui demanda don Pedro.

— C’est fait, reprit le sergent d’une voix haletante, je vous attends.

— Allons donc, et Dieu veuille qu’il ne soit pas trop tard !

— Amen ! dit le soldat.

Tout se fit comme on était convenu ; tandis qu’un détachement attaquait vigoureusement la porte de la Quinta Verde, don Pedro conduisit les troupes commandées par Diego du côté opposé de la maison, où une fenêtre basse était ouverte ; cette fenêtre était grillée, mais plusieurs barreaux avaient été enlevés d’avance, ce qui rendait le passage facile.

Pedro recommanda le silence aux soldats, et ils sautèrent les uns après les autres dans la maison.

Guidés par l’espion, ils s’avancèrent à pas de loups sans rencontrer d’obstacles d’aucune espèce.

Au bout de quelques minutes ils se trouvèrent devant une porte fermée.

— C’est là, dit Pedro à voix basse.

Sur un signe du sergent, la porte fut jetée bas à coups de crosses de fusil, les soldats se précipitèrent dans la salle.

Elle était vide.

Un homme gisait étendu sans mouvement sur le sol.

Le sergent s’élança vers lui, soudain il recula avec un cri d’horreur.