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— C’est vrai ! murmura Louis accablé, mon Dieu ! mon Dieu ! ne nous viendrez-vous pas en aide !

Le chef profita de l’état de prostration dans lequel était momentanément tombé son ami pour le ramener quelques pas en arrière, afin de ne pas exciter davantage les soupçons des Indiens, dont l’ouïe est si fine que la plus légère imprudence suffit pour les mettre sur leurs gardes.

— Mais, reprit le jeune homme au bout de quelques secondes en s’arrêtant devant Trangoil Lanec, nous les sauverons, n’est-ce pas, chef ?

Le Puelche secoua la tête.

— C’est impossible en ce moment, dit-il.

— Frère, maintenant que nous avons retrouvé leur piste que nous avions perdue, il faut les sauver sans retard ; vous le voyez, le temps presse, ils sont en danger.

Un sourire se dessina sur les lèvres du guerrier indien.

— Nous essaierons, dit-il.

— Merci, chef ! s’écria chaleureusement le jeune homme.

— Retournons au camp, reprit Trangoil Lanec. Patience, mon frère, dit l’Indien d’une voix solennelle, rien ne nous presse, dans une heure nous serons sur leur piste ; mais avant d’agir, il faut que nous tenions conseil tous quatre, afin de bien nous entendre sur ce que nous voulons faire.

— C’est juste, répondit le comte en baissant la tête d’un air résigné.

Les deux hommes regagnèrent leur campement, où ils retrouvèrent Valentin et Curumilla profondément endormis.




XXXIX

LE LOUP-CERVIER.


Cependant depuis quelques jours il s’était passé en Araucanie certains événements, que nous devons expliquer au lecteur pour l’intelligence des faits qui vont suivre.

La politique adoptée par le général Fuentès avait eu les meilleurs résultats.

Les chefs rendus à la liberté étaient retournés dans leurs tribus, où ils avaient engagé vivement leurs mosotones à conclure définitivement la paix avec le Chili.

Ces insinuations avaient été reçues partout avec empressement.

Voici pourquoi :

La contrée maritime est habitée par les Huiliches, tribus qui labourent la terre, élèvent les bestiaux et font un grand commerce d’échange avec leurs voisins les hacenderos chiliens.

La guerre avait eu lieu sur le littoral et dans toutes les plaines, jusqu’aux premiers versants des Cordillères.