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mon exemple, alors je pourrai mourir heureux de ce que j’aurai fait, mon but sera atteint, j’aurai sauvé mon pays de l’abîme sur lequel il penche sous la double pression de l’envahissement de l’Union américaine et de l’étiolement de la race espagnole. Ces idées ne sont-elles pas les vôtres, caballero ? Trouvez-vous cette fois que je me suis clairement expliqué ?

— Peut-être, bien que je n’entrevoie pas encore clairement le point où vous voulez arriver. Ces pensées, que vous me supposez, sont celles qui viennent tout naturellement à tous les hommes franchement amis de leur pays, et je ne me disculperai pas de les avoir eues.

— Vous auriez tort, car elles sont grandes, belles, et respirent le patriotisme le plus pur.

— Trêve de compliments, et finissons-en, je vous prie, le temps me presse.

— Patience, je n’ai pas fini encore. Ces idées devaient, à vous, descendant des premiers rois aztèques, défenseur-né des Indiens sur cette malheureuse terre, venir plutôt qu’à un autre ; vous voyez que je vous connais bien, don Miguel Zarate.

— Trop, peut-être, murmura le gentilhomme mexicain.

Le squatter sourit et continua.

— Ce n’est pas le hasard qui m’a amené en ce pays ; en y venant, je savais où j’allais et pourquoi j’y venais. Don Miguel, l’heure est solennelle, tous vos préparatifs sont faits ; hésiterez-vous à donner au Nouveau-Mexique le signal qui doit le rendre indépendant de la métropole, qui depuis si longtemps s’engraisse à ses dépens ? Répondez !

Don Miguel tressaillit ; il fixa sur le squatter un regard ardent, où la souplesse le disputait à l’admiration