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celui de droite servait de chambre à coucher aux deux femmes, les hommes dormaient dans celui de gauche ; le compartiment du milieu, meublé de bancs vermoulus et d’une table faite avec des ais mal équarris, était à la fois la salle à manger et la cuisine.

Il était tard ; les squatters, réunis autour du feu sur lequel bouillait une grande marmite en fer, attendaient silencieusement le retour du Cèdre-Rouge, qui depuis le matin était absent.

Enfin le galop d’un cheval résonna sourdement sur les détritus sans nom accumulés depuis des années sur le sol de la forêt ; le bruit se rapprocha peu à peu, un cheval s’arrêta devant le jacal et un homme parut :

C’était le Cèdre-Rouge.

Les squatters tournèrent lentement la tête vers lui, mais sans se déranger autrement, et sans lui adresser la parole.

Ellen seule se leva et s’avança vers son père, qu’elle embrassa avec effusion.

Le géant saisit la jeune fille dans ses bras nerveux, la souleva de terre et l’embrassa à plusieurs reprises, en lui disant de sa rude voix que la tendresse adoucissait sensiblement :

— Bonsoir, ma colombe.

Puis il la posa à terre et, sans plus s’occuper d’elle, il se laissa lourdement tomber sur un banc auprès de la table, en présentant ses pieds au feu.

— Allons, femme, dit-il au bout d’un instant, à souper, au nom du diable ! j’ai une faim de coyote.

La femme ne le fit pas répéter ; quelques minutes plus tard, un immense plat de frijoles au piment, mélangés de cecina, fumait sur la table avec de larges pots de pulque.