Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/398

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sible de les distinguer à la lueur pâle et incertaine des rayons lunaires, étaient beaux ; une expression de volonté indomptable en formait le trait le plus saillant.

Il portait le costume des riches hacenderos mexicains et tenait de la main droite un rifle américain curieusement damasquiné.

Le missionnaire hésita.

— Eh bien, reprit l’inconnu, à quoi vous décidez-vous, mon père ?

— Monsieur, répondit le père Séraphin avec fermeté, ne prenez pas en mauvaise part ce que je vais vous dire.

L’inconnu s’inclina.

— Je ne sais qui vous êtes, continua le prêtre ; vous vous êtes présenté à moi, au milieu de la nuit, dans des circonstances singulières ; vous insistez avec une ténacité étrange pour voir le pauvre homme que la charité chrétienne m’a poussé à recueillir, la prudence exige que je vous refuse de pénétrer jusqu’à lui.

Une certaine contrariété se peignit sur les traits de l’inconnu.

— Vous avez raison, mon père, répondit-il, les apparences sont contre moi ; malheureusement les explications que vous avez le droit d’exiger nous feraient perdre un temps précieux ; je ne puis donc vous les donner en ce moment. Tout ce que je puis faire, c’est de vous jurer, à la face du ciel, sur le crucifix que vous portez suspendu sur la poitrine et qui est le signe de notre rédemption, que je ne veux que du bien à l’homme que vous avez recueilli, que je poursuis en ce moment le châtiment d’un grand