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La position de l’inconnu était d’autant plus critique que, dans sa précipitation à se mettre à l’abri des attaques de ses ennemis, il avait laissé tomber son rifle qui était sur le sol au pied de l’arbre, et, par conséquent, n’avait pas d’armes pour se défendre et tâcher de se sauver de haute lutte.

Malgré la finesse de leur odorat, les peccaris n’avaient pas éventé l’approche de don Miguel, qui, par un hasard providentiel, avait pénétré dans le bois du côté opposé au vent.

Le Mexicain mit pied à terre en poussant un soupir, flatta un instant son cheval, qu’il débarrassa en un tour de main de ses harnais.

Le noble animal, habitué aux caresses de son maître, remuait la tête avec de petits mouvements de joie et fixait sur lui ses grands yeux intelligents.

Don Miguel ne put retenir un soupir ; une larme coula sur ses jours hâlées. Sur le point d’accomplir le terrible sacrifice qu’il s’imposait, il hésita.

C’était son compagnon fidèle, presque un ami, dont il allait se séparer ; mais la vie d’un homme était en jeu : le Mexicain refoula dans son cœur les sentiments qui l’agitaient et sa résolution fut prise.

Il passa une longe au cou de son cheval, et, malgré sa résistance obstinée, il l’obligea à s’avancer jusqu’à l’entrée de la clairière où les peccaris étaient rassemblés.

Un frêle rideau de lianes et de feuilles le dérobait seul à leur vue.

Arrivé là, don Miguel s’arrêta ; il eut encore une seconde d’hésitation, une seule, puis, saisissant un morceau d amadou, qu’il alluma tout en flattant le pauvre animal, fl le lui introduisit dans l’oreille.