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tués à vivre seuls, prononcé ces paroles à demi-voix, le Cèdre-Rouge sembla reprendre toute son énergie et son audace.

Il jeta autour de lui un regard haineux, et, enfonçant les éperons dans les flancs de son cheval, il partit avec la rapidité d’une flèche dans la direction du rancho qu’il avait quitté quelques heures auparavant, et dans lequel ses deux complices se trouvaient toujours.

Le moine et le gambusino, heureux du dénoûment imprévu de la scène que nous avons rapportée plus haut, heureux surtout d’être débarrassés de doña Clara sans avoir eu besoin de tremper directement dans son évasion, avaient tranquillement repris leur partie de monté et jouaient avec ce contentement intérieur que donne la certitude de n’avoir rien à se reprocher, se disputant avec acharnement les quelques réaux qu’ils possédaient encore et qu’à grand’peine ils découvraient au fond de leurs poches.

Tout à coup, au milieu d’un coup des plus intéressants, ils entendirent le galop furieux d’un cheval qui faisait résonner les cailloux sous son pas rapide.

Instinctivement les deux hommes prêtèrent l’oreille.

Un pressentiment secret sembla les avertir que ce cheval se dirigeait vers le rancho et que c’était à eux qu’en voulait l’homme qui le montait.

En effet, ni Fray Ambrosio, ni Andrès Garote n’avaient la conscience tranquille, en supposant, ce qui était plus que douteux, que ces dignes compagnons possédassent une conscience, car, vis-à-vis du Cèdre-Rouge, ils se reconnaissaient responsables de doña Clara. Maintenant que la jeune fille s’était envolée comme un oiseau captif qui s’échappe de sa cage en en brisant les barreaux, leur position vis-à-vis de leur re-