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chete à la main, s’avançait résolument vers la table, derrière laquelle leur audacieux adversaire, debout et les bras croisés, semblait les défier d’un ironique sourire après les avoir si cruellement raillés.

— Qui que vous soyez, by God ! dit le Cèdre-Rouge en s’arrêtant à deux pas de son adversaire, le hasard vous a rendu maître d’un secret qui tue, vous allez mourir !

— Croyez-vous, en effet, que ce soit au hasard que je doive de savoir vos secrets ? répondit l’autre avec un accent railleur.

— Défendez-vous ! hurla le Cèdre-Rouge avec rage, si vous ne voulez pas que je vous assassine ; car, con mil diablos ! je n’hésiterai pas, je vous en préviens.

— Je le sais, répondit tranquillement l’inconnu ; je ne serais pas la première personne à laquelle cela serait arrivé, les mornes de la Sierra Madre et el Bolson de Mapini ont souvent entendu les cris d’agonie de vos victimes, lorsque les Indiens vous manquaient pour compléter votre contingent de chevelures.

À cette allusion à son affreux métier, le squatter sentit une pâleur livide envahir son visage, un tremblement agita tous ses membres, et il s’écria d’une voix étranglée :

— Vous mentez ! je suis chasseur !

— De chevelures ! reprit immédiatement l’inconnu, à moins que depuis votre dernière expédition au village des Coras vous n’ayez renoncé à cet honorable et lucratif métier.

— Oh ! s’écria le squatter avec un geste de rage indicible, c’est un lâche celui qui, pour prononcer de telles paroles, se cache le visage.

L’inconnu haussa les épaules avec dédain, et, fai-