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— Parce que ?

— Parce que cela ne me plaît pas, voilà tout. Maintenant, messieurs, ne vous occupez plus de moi, je vous prie, continuez votre conversation : elle était à mon arrivée des plus intéressantes ; vous parliez, je crois, d’une expédition que vous préparez ; il était même question, si je ne me trompe, à l’instant où je suis entré, d’une jeune fille que votre digne ami ou associé, je ne sais lequel, a enlevée, de compte à demi avec vous. Que je ne vous dérange pas. Je serai charmé, au contraire, de savoir ce que vous avez l’intention de faire de cette malheureuse jeune femme.

Aucune expression ne saurait rendre le sentiment de stupeur et d’épouvante qui s’empara des trois associés à cette révélation foudroyante de leurs projets.

Lorsqu’ils pensaient être parvenus, à force d’adresse et de ruse, à les dissimuler complétement, les voir ainsi dévoilés tout à coup dans toute leur étendue, par un homme qu’ils ne connaissaient pas, mais qui les connaissait, lui, et ne pouvait, en conséquence, être pour eux qu’un ennemi, cela les effraya à un tel point qu’un instant ils crurent avoir affaire au génie du mal. Les deux Mexicains firent simultanément le geste de se signer ; le Nord-Américain poussa une sourde exclamation de colère.

Mais Cèdre-Rouge et Fray Ambrosio étaient des hommes trop endurcis dans le vice pour qu’un événement, si grave qu’il fût, les abattit longtemps. Le premier moment passé, ils se redressèrent, et l’étonnement faisant place à la fureur, le moine tira de sa botte vaquera un couteau à lame acérée et fut se placer devant la porte pour barrer le passage à l’inconnu, tandis que le Cèdre-Rouge, le sourcil froncé et le ma-