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— Non-seulement je le crois, mais encore j’en suis sûr. Comme moi, mon ami, vous connaissez les Indios bravos, vous savez la haine implacable qu’ils nous ont vouée ; la guerre qu’ils nous font est atroce ; pour que tout à coup, sans raison plausible, ils se soient métamorphosés de loups en agneaux, il faut qu’une raison bien forte les ait contraints à agir ainsi : l’on n’abjure pas en quelques minutes une haine qui dure depuis des siècles. Les Comanches, le choix qu’ils ont fait parmi nous le prouve, connaissent l’importance des prisonniers dont ils se sont emparés ; comment se fait-il qu’ils consentent aussi facilement à s’en défaire pour une rançon insignifiante ? Il y a là pour moi un problème insoluble.

— Bien facile à expliquer pourtant, dit une voix railleuse qui partit de derrière les buissons.

Les deux Mexicains tressaillirent et arrêtèrent subitement leurs chevaux.

Un homme s’élança d’un taillis et parut tout à coup au milieu du sentier que suivait la petite troupe des chasseurs.

Ceux-ci, croyant à une nouvelle attaque et à une trahison des Comanches, saisirent leurs armes.

— Arrêtez ! s’écria vivement don Miguel ; cet homme est seul, laissez-moi lui parler.

Chacun attendit, la main sur ses armes.

— Holà ! continua don Miguel en s’adressant à l’inconnu qui restait immobile au milieu du sentier, nonchalamment appuyé sur son fusil, qui êtes-vous, mon maître ?

— Ne me reconnaissez-vous pas, don Miguel, et faut-il absolument que je vous dise mon nom ? répondit en riant l’inconnu.