Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/151

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le moine était livide, un tremblement nerveux agitait tous ses membres ; il lâcha la bride de la mule et suivit machinalement le squatter qui se rassit tranquillement à terre en lui faisant signe de l’imiter.

Le moine se laissa tomber sur le sol en étouffant un soupir et essuyant les gouttes d’une sueur froide qui perlaient à ses tempes.

— Eh ! eh ! reprit le squatter au bout d’un instant, c’était, il faut en convenir, un charmant cavalier que ce don Pedro de Tudela, un peu fou peut-être ; mais que voulez-vous ? il était jeune. Je me rappelle qu’à Albany, il y a longtemps de cela déjà, seize ou dix-sept ans à peu près, — comme on vieillit cependant ! — je l’ai connu chez un certain… attendez donc, le nom m’échappe, ne pourriez-vous pas m’aider à le retrouver, par hasard, Fray Ambrosio ?

— Je ne sais ce que vous voulez dire, murmura le moine d’une voix sourde.

Cet homme était dans un état à faire pitié, les veines de son front se gonflaient à se rompre ; il étouffait ; sa main droite tourmentait le manche de son poignard, il fixait sur le squatter un regard empreint d’une haine mortelle.

Celui-ci sembla ne rien voir.

— J’y suis, continua-t-il, cet homme se nommait Walter Brunnel ; c’était un bien digne gentleman.

— Démon ! s’écria le moine d’une voix étranglée, je ne sais qui t’a rendu maître de cet horrible secret ; mais tu vas mourir !

Et il se précipita sur lui, le poignard à la main.

Cèdre-Rouge connaissait Fray Ambrosio de longue date, il était sur ses gardes.

D’un mouvement brusque, il lui arrêta le bras,