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est assurée, à moins que les Visages Pâles ne s’envolent au plus haut des airs ou plongent au plus profond des eaux, ce qui ne peut arriver ; ils sont perdus.

La jeune fille ne répondit pas, sans plus songer au chef indien dont le regard perçant restait fixé sur elle ; elle se leva et se mit à marcher avec agitation.

— Mon Dieu ! mon Dieu ! disait-elle à demi-voix, ils sont perdus ! Oh ! n’être qu’une femme et ne pouvoir rien pour eux ! Comment les sauver ?

— Que dit donc ma fille ? Wacondah lui aurait-il troublé l’esprit ? lui demanda le Chat-Noir en lui posant la main sur l’épaule et se plaçant devant elle.

L’Espagnole le regarda un instant, puis elle laissa tomber sa tête dans ses mains en murmurant d’une voix étouffée :

— Mon Dieu ! mon Dieu ! je suis folle !

Le Chat-Noir jeta un regard scrutateur autour de lui, et se penchant à l’oreille de la jeune fille :

— Que ma sœur me suive, dit-il d’une voix ferme et accentuée.

La Gazelle blanche releva la tête et fixa les yeux sur lui ; le chef posa un doigt sur sa bouche comme pour lui recommander le silence, et, tournant le dos, il s’enfonça dans le bois.

La jeune fille le suivit, inquiète.

Ils marchèrent pendant quelques minutes.

Enfin ils arrivèrent au sommet d’un monticule dégarni d’arbres d’où l’œil, planant dans l’espace, distinguait tous les environs.

Le Chat-Noir s’arrêta, et faisant signe à l’Espagnole de s’approcher de lui :

— Ici nous pouvons causer ; que ma fille parle ; mes oreilles sont ouvertes.