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mettez vos associés dans l’embarras, ce qui n’est pas loyal.

— Il ne s’agit pas de cela, dit Nathan ; si notre père veut se faire puritain, cela le regarde, ce n’est pas moi qui le trouverai mauvais ; mais il y a temps pour tout. À mon avis, ce n’est pas lorsque l’on est entouré d’ennemis, traqué comme une bête fauve, qu’il convient d’endosser une toison d’agneau et de se poser en homme inoffensif.

— Que voulez-vous dire ? s’écria le squatter avec impatience ; aurez-vous bientôt fini de parler par énigmes ? Voyons, expliquez-vous une fois pour toutes et que cela finisse.

— C’est ce que je vais faire, reprit Nathan. Pendant que vous vous endormez dans une trompeuse sécurité, vos ennemis veillent et tissent incessamment la trame dans laquelle ils ont l’espoir de bientôt vous envelopper. Croyez-vous que depuis longtemps déjà nous ne connaissions pas votre retraite ? Qui peut espérer de se cacher dans la prairie sans être découvert ? Seulement nous n’avons pas voulu troubler votre repos avant que le moment fût arrivé de le faire ; voilà pourquoi vous ne nous voyez qu’aujourd’hui.

— Oui, fit le moine ; mais à présent le temps presse : pendant que vous vous fiez aux belles paroles du missionnaire français qui vous a soigné et qui vous endort afin de vous tenir toujours sous sa main, vos ennemis se préparent en silence à vous attaquer tous à la fois et à en finir avec vous.

Le squatter fit un geste d’étonnement.

— Mais cet homme m’a sauvé la vie, dit-il.

Les trois hommes éclatèrent de rire.

— À quoi sert l’expérience pourtant ! fit le moine