avaient rompu le charme qui enchaînait les convives ; tous se redressèrent comme s’ils se réveillaient en sursaut, et se tournant vers un jeune homme d’une trentaine d’années, assis au milieu d’eux :
— Ainsi, lui dirent-ils tous, c’est bien vrai, tu pars ?
— Je pars, répondit-il, avec un signe de tête affirmatif.
— Mais où vas-tu, enfin ? on ne quitte pas ainsi, sans dire gare, son pays et ses amis, reprit un des convives.
Celui à qui cette question était adressée sourit tristement.
Le comte de Lhorailles était un beau gentilhomme aux traits expressifs, au regard énergique, à la lèvre dédaigneuse, appartenant à la plus ancienne noblesse, et dont la réputation était parfaitement établie par les lions de l’époque.
Il se leva, et jetant un regard circulaire sur les convives :
— Messieurs, dit-il, je comprends ce que ma conduite a d’étrange pour vous ; vous avez droit à une explication de ma part ; cette explication, je ne demande pas mieux que de vous la donner. Du reste, c’est dans ce but, croyez-le bien, que je vous ai convoqués à assister aujourd’hui au dernier repas que nous devons faire ensemble ; l’heure du départ a sonné, la chaise de poste attend, demain je serai loin de Paris, dans huit jours j’aurai quitté la France pour n’y plus revenir ; écoutez-moi.
Les convives firent un mouvement marqué en regardant attentivement le comte.
— Ne vous impatientez pas, messieurs, dit-il,