droit d’émettre son opinion, sans craindre de blesser l’amour-propre de qui que ce soit. Parlez, je vous écoute. À vous d’abord, sergent Boilaud ; comme le moins avancé en grade, vous devez prendre le premier la parole.
Le sergent Boilaud était un vieux soldat d’Afrique rompu à la discipline militaire, connaissant à fond son école du soldat, ce que dans l’armée on est convenu d’appeler un vrai troupier dans toute l’acception du terme ; mais nous devons avouer qu’il n’était pas du tout orateur.
À l’interpellation directe de son chef, il sourit, rougit comme une jeune fille, baissa la tête, ouvrit une bouche démesurée et demeura court.
Le comte de Lhorailles, s’apercevant de son embarras l’engagea avec bonté à parler. Enfin, à force d’efforts, le sergent parvint à prendre ma parole d’une voix enrouée et parfaitement indistincte :
— Dame ! capitaine, dit-il, je comprends que la situation n’a rien de fort gai ; mais à la guerre comme à la guerre ! On est troupier ou on ne l’est pas. Pour lors, mon avis est que vous devez faire comme vous l’entendrez, et que nous sommes ici pour vous obéir en tout, ainsi que c’est péremptoirement notre devoir, sans raisons subséquentes et oiseuses.
Les assistants ne purent s’empêcher de rire de la profession de foi du digne sergent, qui se tut tout honteux.
— À vous, capataz, dit le capitaine ; donnez-nous votre avis.
Blas Vasquez fixa ses yeux ardents sur le comte.