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grisâtre tombant en longs festons, n’avait rien de fort récréatif : l’ennui gagnait la compagnie.

La réverbération du soleil sur le sable causait des ophthalmies, l’eau décomposée par la chaleur n’était plus potable, les vivres se gâtaient, le scorbut commençait ses ravages parmi les soldats, que la nostalgie gagnait peu à peu.

Cet état de choses devenait intolérable ; il fallait aviser aux moyens d’en sortir le plus tôt possible.

Le comte réunit ses officiers en conseil.

Ce conseil se composait des lieutenants Diego Léon et Martin Leroux, du sergent Boileau, de Blas Vasquez et de Cucharès.

Ces cinq personnes, présidées par le comte de Lhorailles, prirent place sur des ballots, tandis qu’à peu de distance les soldats, couchés sur le sol, cherchaient à s’abriter à l’ombre de leurs chevaux, attachés au piquet.

Il était urgent de réunir le conseil, la compagnie se démoralisait rapidement ; il y avait de la révolte dans l’air, des plaintes étaient déjà proférées à haute voix. L’exécution de la Casa-Grande était complètement oubliée, et si l’on n’avisait pas promptement à porter remède au mal, nul ne savait quelles conséquences terribles amènerait ce mécontentement général.

— Messieurs, dit le comte de Lhorailles, je vous ai réunis afin d’aviser avec vous aux moyens de faire cesser l’abattement dans lequel depuis quelques jours est plongée la compagnie. Les circonstances sont si graves, que je vous serai reconnaissant de me donner franchement votre avis ; il s’agit du salut général, et, dans une semblable position, chacun a