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s’étendaient ces immenses prairies dont le sol ondulé s’élève peu à peu jusqu’aux premiers plans de la Sierra Madre et de la Sierra de los Comanches. Plus de plaines désolées et stériles, sans arbres et sans eau. Une nature luxuriante, d’une force de production inouïe ; des arbres, des fleurs, des herbes des oiseaux innombrables chantant joyeusement sous la feuillée, des animaux de toutes sortes courant, broutant et s’ébattant au milieu des prairies naturelles.

L’homme partout et toujours, quelles que soient d’ailleurs ses préoccupations personnelles, subit à son insu l’influence des objets extérieurs : une nature riante le rend gai, de même qu’un sombre paysage l’attriste.

Les voyageurs se laissèrent instinctivement aller à l’impression de bien-être que leur causait la vue du splendide et majestueux spectacle que leur offrait la prairie, en face du désert désolé qu’ils quittaient, et dans lequel ils avaient erré si longtemps à l’aventure. Ce contraste était pour eux plein de charme, ils sentaient renaître leur courage et l’espoir rentrer dans leur cœur.

Vers onze heures du matin, les chevaux se trouvèrent tellement fatigués que l’on fut contraint de camper afin de leur donner quelques heures de repos et de laisser passer la plus grande chaleur du jour.

Don Martial choisit le sommet d’une colline boisée, d’où l’on dominait la prairie tout en restant parfaitement caché au milieu des arbres.

Seulement le Tigrero s’opposa à ce qu’on allumât du feu pour faire cuire les aliments, la fumée aurait suffi pour faire découvrir leur retraite, et dans la position où ils se trouvaient, ils ne pouvaient user