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lants d’eau, le salon, que leurs pieds avaient à demi décarrelé et où ils laissaient de larges traces de leur passage.

Au moment où nous introduisons le lecteur dans la maison de don Syla de Torrès, deux personnes, un homme et une femme, étaient assis et causaient, ou du moins échangeaient à longs intervalles quelques paroles dans le salon.

Ces deux personnages étaient don Sylva et sa fille Anita.

Le croisement des races espagnole et indienne a produit le plus beau type plastique qui se puisse voir.

Don Sylva, bien qu’il fût âgé de près de cinquante ans, en paraissait quarante à peine ; sa taille était haute, bien prise, sa démarche noble, son visage sévère, mais empreint d’une grande douceur. Il portait le costume mexicain dans sa plus rigoureuse exactitude ; mais les vêtements qui le couvraient étaient d’une richesse que certes peu de ses compatriotes auraient pu, non pas surpasser, mais seulement égaler.

Anita, couchée sur un canapé, à demi enfouie dans des flots de soie et de gaze, comme un colibri caché dans de la mousse, était une charmante enfant de dix-huit ans au plus, dont les yeux noirs pudiquement voilés par de longs cils de velours, étaient pleins de voluptueuses promesses que ne démentaient pas les contours onduleux et serpentins de son corps délicieusement modelé. Ses moindres gestes avaient une grâce et une majesté que complétait le ravissant sourire de ses lèvres de corail. Son teint, légèrement doré par le soleil américain, donnait à son vi-