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tel de don Sylva, tant la conduite de l’haciendero paraissait extraordinaire.

Renfermé dans sa demeure, dont les portes ne s’ouvraient que devant quelques privilégiés, don Sylva laissait marcher les bavardages sans paraître s’en soucier le moins du monde, poursuivant, selon toute apparence, la réalisation de certains projets dont l’importance l’empêchait de s’occuper de ce que l’on disait et pensait de lui.

Bien que les Mexicains soient excessivement riches et qu’il aiment à se faire honneur de leurs richesses, ils n’ont aucune idée du confortable ; chez eux règne la plus grande incurie. Leur luxe, s’il est permis d’employer cette expression, est brutal, sans discernement comme sans valeur réelle.

Ces hommes, habitués pour la plupart à la rude vie des déserts américains, à lutter continuellement contre les intempéries d’un climat souvent mortel et les aggressions incessantes des Indiens qui les cernent de toutes parts, campent plutôt qu’ils n’habitent dans les villes, croyant avoir tout fait lorsqu’ils ont follement prodigué l’or et les diamants.

Les habitations mexicaines sont là pour prouver la justesse du jugement que nous portons. À part l’inévitable piano européen qui se prélasse dans un angle de tous les salons, on ne rencontre que quelques butacas incommodes, des tables mal équarries, de mauvaises gravures enluminées, pendues le long des murs blanchis à la chaux, et voilà tout.

La demeure de don Sylva ne différait en aucune façon des autres, et comme partout, pour rentrer à l’écurie en revenant de l’abreuvoir, les chevaux du maître étaient contraints de traverser, tout ruisse-