lequel l’ennemi, procédé de l’incendie devait venir, traversa sur l’autre rive. Aussitôt qu’il eut atteint le rivage, il laissa son cheval reprendre haleine quelques minutes, le bouchonna avec soin, puis sautant d’un bond sur la peau de panthère qui lui servait de selle, il s’élança à fond de train dans la direction du camp ennemi.
Cette course furieuse dura deux heures. La nuit avait depuis longtemps déjà succédé au jour, les lueurs blafardes de l’incendie servaient de phare au chef et lui indiquaient dans les ténèbres le chemin qu’il lui fallait suivre.
Au bout de ces deux heures, l’Indien se trouva juste en face de la pointe la plus avancée de l’île, où les Apaches étaient en ce moment occupés à réunir les bois flottants destinés à leur servir pour la surprise qu’ils méditaient contre la colonie.
La Tête-d’Aigle s’arrêta.
Sur sa droite, bien loin derrière lui, l’incendie flamboyait à l’horizon ; autour de lui, tout était obscurité et silence.
Longtemps l’Indien considéra attentivement l’île ; un pressentiment secret l’avertissait que là était pour lui le danger.
Pourtant, après avoir mûrement réfléchi, le chef se résolut à s’avancer encore de quelques pas et à retraverser la rivière à la pointe opposée de cette île, qui lui était d’autant plus suspecte qu’elle paraissait plus calme.
Cependant, avant de mettre ce projet à exécution, une inspiration subite éclaira son esprit ; il mit pied à terre, cacha son cheval dans un fourré, se débarrassa de son rifle et de sa robe de bison ; puis, après