Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/246

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Nous, non ! s’écria vivement le comte ; mais les habitants de l’hacienda ?

— Pas davantage, reprit Belhumeur ; voyez, tous les arbres ont été coupés et déracinés à une trop grande distance de la colonie pour que le feu puisse l’atteindre : ce n’est qu’un stratagème employé par les Indiens, afin de pouvoir arriver jusqu’ici sans être comptés.

— Cependant je suis de l’avis de ce caballero, fit le capataz ; nous ferons bien, je crois, d’avertir à l’hacienda.

— Il y a encore autre chose de plus urgent à faire, dit le comte, c’est d’expédier un batteur d’estrade adroit, afin de savoir positivement à qui nous avons affaire, quels sont nos ennemis et s’ils sont nombreux.

— L’un n’empêche pas l’autre, reprit Belhumeur ; dans un cas comme celui qui se présente, deux précautions valent mieux qu’une. Voici mon avis : la Tête-d’Aigle reconnaîtra l’ennemi, tandis que nous, nous nous rendrons à l’hacienda.

— Tous ? observa le capataz.

— Non ; votre position ici est sûre, vous êtes à même, en cas d’attaque sérieuse, de nous rendre de grands services ; don Luis et moi nous irons seuls à la colonie. Souvenez-vous que vous ne devez vous montrer sous aucun prétexte. Quoi qu’il arrive, attendez l’ordre d’agir, est-ce bien convenu ?

— Allez, caballeros, je ne tromperai pas votre confiance.

— Bien. Maintenant, à l’œuvre. Vous, chef, je n’ai aucune recommandation à vous faire ; vous nous trouverez à l’hacienda si vous apprenez quelque chose d’important.