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— Un mot, capataz, fit Belhumeur.

— Deux, si cela vous plaît.

— Connaissez-vous l’homme auquel vous avez remis une lettre tout à l’heure ?

— Pourquoi cela ?

— Pour que vous me renseigniez sur son compte.

— Personnellement, je ne le connais que fort peu ; tout ce que je puis vous en dire, c’est qu’il jouit d’une excellente réputation dans toute la province, et qu’il passe généralement pour un caballero et un galant homme.

— C’est quelque chose, murmura le Canadien en hochant la tête ; malgré cela, je ne sais pourquoi, mais son départ précipité m’inquiète fort.

— Ooeh ! fit tout à coup la Tête-d’Aigle en retirant de ses lèvres le tuyau du calumet et en penchant la tête en avant, tout en recommandant d’un geste le silence à ses compagnons.

Tous demeurèrent immobiles, les yeux fixés sur le chef indien.

— Qu’y a-t-il ? demanda enfin Belhumeur.

— Le feu ! répondit lentement celui-ci. Les Apaches arrivent, ils brûlent la prairie devant eux.

— Comment ! se récria Belhumeur en se levant et en regardant de tous les côtés, je ne vois nulle trace de feu.

— Non, pas encore ; mais le feu arrive, je le sens.

— Hum ! si le chef le dit, cela doit être vrai ; c’est un guerrier trop expérimenté pour se tromper : que faire ?

— Nous n’avons ici rien à redouter de l’incendie, observa le capataz.