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de la terre ferme, en formant une défense naturelle aux hommes cachés dans les hautes herbes ; car il était de toute impossibilité que les Indiens pussent s’embusquer dans les palétuviers pour inquiéter leurs ennemis, qui, eux au contraire, leur feraient beaucoup de mal.

Cet îlot, nous lui conserverons ce nom, bien qu’il ne fût en réalité qu’un radeau, était couvert d’une herbe drue, forte, serrée, haute de près de deux mètres, au milieu de laquelle hommes et chevaux disparaissaient complètement. Lorsque la reconnaissance fut terminée, Belhumeur et les deux Mexicains s’installèrent au centre, où ils placèrent leur bivouac, tandis que Louis et la Tête-d’Aigle regagnaient le rivage, afin d’aller à la rencontre du capataz et de ses gens.

Don Martial ne se souciait pas de les accompagner ; il craignait, aussi près de la colonie, d’être reconnu par don Sylva, et préférait garder le plus longtemps possible un incognito nécessaire pour la réussite de ses projets ultérieurs.

Louis, après lui avoir offert qu’il raccompagnât, n’insista pas et parut admettre son refus sans discussion.

La vérité était que le comte éprouvait, sans pouvoir se l’expliquer, une espèce de répulsion pour cet homme, dont les manières cauteleuses et les hésitations continuelles l’avaient fort mal disposé en sa faveur.

La Tête-d’Aigle et Louis, certains que l’Ours-Noir s’était définitivement éloigné avec son détachement sans laisser d’espions dans la prairie, jugèrent inutile de faire faire aux Mexicains un long et fatiguant