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— Il allait l’émettre à l’instant où vous êtes entré.

— Alors, que je ne dérange pas votre conférence ; j’écoute. Parlez, monsieur.

Don Luis s’inclina et prit la parole.

— Caballero, fit-il en se tournant vers don Sylva, ce que je vais dire est pour les señores français principalement, qui, habitués aux guerres européennes et à la manière de combattre des blancs, ignorent, j’en suis convaincu, la tactique indienne.

— C’est vrai, observa le comte.

— Bah ! fit Leroux en tordant ses longues moustaches avec suffisance, nous l’apprendrons.

— Prenez garde que ce ne soit à vos dépens ! continua don Luis. La guerre indienne est une guerre toute de ruses et d’embûches. Jamais l’ennemi qui vous attaque ne se met en ligne devant vous : il reste constamment caché, employant pour vaincre tous les moyens, surtout la trahison. Cinq cents guerriers apaches, commandés par un chef intrépide, auraient raison, dans la prairie, de vos meilleurs soldats qu’ils décimeraient, sans que ceux-ci pussent jamais les atteindre.

— Oh ! oh ! murmura le comte. Est-ce donc leur seule manière de combattre ?

— La seule, appuya l’haciendero.

— Hum ! fit Leroux, c’est, il me semble, assez semblable à la guerre d’Afrique.

— Pas autant que vous le supposez. Les Arabes se laissent voir, au lieu que les Apaches, je vous le répète, ne se découvrent qu’à la dernière extrémité.