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Du reste, un poste de six hommes gardait la batterie de l’isthme, dont les canons étaient prêts à tonner à la moindre alerte.

Aussi la caravane était-elle encore loin de l’hacienda que déjà sa venue avait été signalée, et que le lieutenant du comte, vieux soldat d’Afrique, à cheval sur la discipline, et nommé Martin Leroux, se tenait derrière la batterie pour interroger les arrivants dès qu’ils seraient à portée de voix.

Don Sylva connaissait parfaitement la consigne établie dans l’hacienda, consigne commune du reste à tous les établissements des blancs ; car dans les postes des frontières, où l’on est exposé aux déprédations continuelles des Indiens, on est forcé de se tenir sans cesse sur ses gardes.

Mais une chose que ne pouvait pas comprendre le Mexicain, c’est que le lieutenant du comte, qui devait l’avoir parfaitement reconnu, ne lui eût pas ouvert immédiatement les portes.

Il en fit même l’observation.

— Il aurait eu tort, répondit le comte, la colonie de Guetzalli est une place de guerre ; la consigne doit être la même pour tous ; de son observation stricte et entière dépend le salut général. Martin m’a reconnu depuis longtemps déjà, j’en suis convaincu, mais il peut supposer que je suis prisonnier des Indiens, et qu’en me laissant libre en apparence, ils ont l’intention de surprendre la colonie. Soyez convaincu que mon brave lieutenant ne nous livrera passage qu’à bon escient et lorsqu’il sera certain que nos vêtements européens ne recouvrent pas des peaux rouges.

— Oui, murmura don Sylva à part lui, tout cela