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folles ; en dernier lieu, il était sur le point d’épouser la fille d’un homme vingt fois millionnaire, autant qu’il lui avait été possible d’en juger, et, ce qui ne gâtait rien à l’affaire, sa fiancée était charmante.

Malheureusement ou heureusement, suivant le point de vue où il plaira au lecteur de se placer pour juger notre héros, cet homme blasé par les excentricités énervantes de la vie parisienne ne sentait plus battre son cœur sous l’effort d’aucune émotion de joie, de douleur ou de crainte : tout était mort chez lui.

Il était bien l’homme qu’il fallait pour réussir dans le pays où le hasard l’avait jeté. Dans le grand duel de la vie qu’il avait commencé en Amérique, il avait un avantage immense sur ses adversaires, celui de ne se laisser jamais diriger par la passion, et par conséquent, grâce à son inaltérable sang-froid, de pouvoir déjouer les pièges incessamment tendus sous ses pas et dont il triomphait sans paraître s’en apercevoir.

Après ce que nous avons dit, nous n’avons pas besoin d’ajouter qu’il n’aimait pas la femme dont il recherchait la main : elle était jeune et belle, tant mieux ; elle eût été vieille et laide, il l’eût acceptée de même. Que lui importait à lui ? il ne recherchait qu’une chose dans ce mariage, une position brillante et enviée.

Bref, chez le comte de Lhorailles tout était calcul.

Nous nous sommes trompé en affirmant que le comte de Lhorailles n’avait pas de côté faible : il était ambitieux.

Cette passion, une des plus violentes de toutes