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muraille et croisant une jambe sur l’autre, je réponds de tout,

Le Mexicain se contenta, ou du moins parut se contenter de cette assurance ; il saisit la reata, et, prenant son élan en bondissant sur place comme une de ces panthères que, si souvent, il avait poursuivies dans les savanes, il s’enleva à la force des poignets, et, en quelques secondes, il atteignit le balcon.

Il l’enjamba et s’approcha de la fenêtre.

Doña Anita dormait, à demi couchée sur un fauteuil.

La pauvre enfant, pâle et défaite, les yeux gonflés de larmes, avait été vaincue par le sommeil qui jamais ne perd ses droits sur les natures jeunes et vigoureuses. Sur ses joues marbrées les pleurs avaient tracé un long sillon humide encore. Martial regardait d’un œil attendri celle qu’il aimait, sans oser s’approcher. Surprise ainsi pendant son sommeil, la jeune fille lui apparaissait plus belle ; une auréole de pureté et de candeur semblait planer au-dessus d’elle, veiller sur son repos et la faire sainte et inattaquable.

Après une longue et voluptueuse contemplation, le Tigrero se décida enfin à s’avancer.

La fenêtre, poussée seulement, car la jeune fille ne croyait sans doute pas s’endormir ainsi, s’ouvrit au moindre effort de don Martial ; il fit un pas et se trouva dans la chambre.

À la vue de cette chambre de jeune fille si calme et si pure, un respect religieux s’empara du Tigrero ; il sentit son cœur battre à rompre sa poitrine, et