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LA FIÈVRE D’OR.

sur le front de la jeune fille en se détournant pour ne pas laisser lire l’impression douce et douloureuse à la fois que lui faisait éprouver une action si simple.

Doña Angela, souriante et rougissante, se réfugia, honteuse, dans les bras de son père, en laissant dans la main de don Luis une petite relique qu’elle portait habituellement au cou.

— Gardez-la, lui dit-elle, avec cette douce superstition espagnole si remplie de grâce, elle vous portera bonheur.

— Oui, je la garderai, señorita, répondit le comte en la cachant dans sa poitrine, pour me souvenir du moment de bonheur qu’à votre insu vous m’avez fait éprouver aujourd’hui, en me prouvant que malgré mes malheurs mon cœur n’est pas encore aussi mort que je le croyais.

On fit les préparatifs de départ. Don Sébastian, privé de ses domestiques, ne pouvait songer à continuer son voyage ; il voulait retourner à Guadalajara, afin de prendre une autre escorte qui lui permît de ne plus exposer sa fille à un danger semblable à celui auquel elle n’avait échappé que par miracle. Seulement le colonel était fort embarrassé de don Cornelio, qu’il ne voulait pas abandonner, et que cependant il ne savait comment transporter.

— Je me charge de cet homme, caballero, lui dit alors don Luis ; ne vous en occupez pas davantage ; mon ami et moi, nous ne sommes pas fort pressés, nous le conduirons au meson de San-Juan, où nous ne le quitterons qu’après complète guérison.

Deux heures plus tard, les deux troupes se séparèrent devant le meson de Saccaplata, qui les vit