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LA FIÈVRE D’OR.

L’hôtelier fut enlevé, porté près d’un arbre, et avant qu’il eût compris ce qu’on voulait de lui, il poussa un cri de douleur horrible ; un bandit, d’un coup de poignard, l’avait cloué à l’arbre par l’oreille droite.

— Là, voilà qui est fait, dit le lieutenant. Maintenant, je t’avertis que si tu continues à beugler ainsi, on te bâillonnera.

— Traîtres ! bourreaux ! assassins ! tuez-moi !

— Non, mais écoute : cette blessure n’est rien, il t’est facile de te délivrer en tirant un peu ; ton oreille sera déchirée, il est vrai, mais on ne peut pas tout avoir ; aussitôt libre, retourne chez toi ; un de nos amis t’accompagnera, et tu lui compteras le reste de la somme.

— Jamais ! hurla l’hôtelier. Jamais ! j’aime mieux mourir.

— Alors, fort bien, tu mourras, et puis après nous enlèverons ce que renferme la cachette que tu as si adroitement dissimulée dans le mur de ton cuarto, en plaçant devant un tableau de Nuestra Senora de Guadalupe. Hein ? Qu’en penses-tu ?

À peine le lieutenant finissait-il de parler que l’hôtelier, par un brusque mouvement, avait recouvré sa liberté.

Sans songer à son oreille affreusement mutilée, il se jeta aux genoux d’el Garrucholo.

— J’accepte, monseigneur, j’accepte ; mais, je vous en prie, ne me ruinez pas.

— Je savais bien que tu comprendrais. Pars, drôle, et si cela peut te consoler, sache que tu seras vengé du colonel.

— Oui, murmura à part lui l’hôtelier, mais qui me