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LA FIÈVRE D’OR.

que nous avions déjà l’intention d’arrêter le colonel.

— Ah ! fit l’hôtelier, qui commençait à se rassurer.

— Oui ; seulement, après y avoir mûrement réfléchi, nous avions renoncé à ce projet ; le colonel est brave, il se défendra ; de plus, il a avec lui quatre hommes déterminés et bien armés… ma foi, il y avait trop à risquer ; mais si tu y tiens…

— Énormément, s’écria l’autre, trompé par le ton de fausse bonhomie du bandit.

— Fort bien, reprit celui-ci en changeant de ton ; alors c’est une affaire que nous faisons ensemble. Or, toute affaire se paie, tu ne l’ignores pas, mon drôle.

Saccaplata fit un geste de désappointement en se tournant involontairement vers les salteadores, qui le regardaient d’un air goguenard.

— En conséquence, continua impassiblement le capitaine, tu vas me payer vingt onces pour ta vengeance, que je prends à mon compte, et dix pour ta rançon.

— Dieu me garde ! s’écria l’hôtelier en joignant les mains avec désespoir, je n’ai jamais, même en rêve, possédé pareille somme.

— Cela m’est parfaitement indifférent. Je ne reviens, dans aucune circonstance, sur une détermination ; un autre jour, tu y réfléchirais à deux fois, avant de venir te mettre à l’étourdie dans les serres del Buitre. L’orejada…

— Oh ! monseigneur s’écria le malencontreux Saccaplata, en tombant à genoux, je suis un pauvre diable, ayez pitié de moi, noble capitaine, je vous en supplie.