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LA FIÈVRE D’OR.

ces religieuses, d’autres par l’esprit d’aventure, d’autres, en plus grand nombre encore, talonnés par la misère, après avoir abordé en pèlerins sur les plages américaines, demandant asile aux pauvres et innocents habitants de ces contrées hospitalières, achetant pour des futilités des terres fertiles, se sont peu à peu rapprochés les uns des autres, se sont agglomérés, ont chassé les premiers possesseurs du sol pour prendre leur place, ont fondé des villes, des ports, construit des arsenaux, et un jour, secouant le joug de la métropole sous l’égide de laquelle ils s’étaient peureusement et frileusement abrités, ils se sont constitués en État indépendant et ont fondé ce colosse aux pieds d’argile, au corps d’or et à la tête de boue que l’on nomme les États-Unis d’Amérique.

Humble dans ses commencements, cette pauvre république, faisant sonner bien haut les mots de fraternité et de liberté, mots dont par parenthèse elle n’a jamais compris la noble et grandiose signification, affichant une tolérance rigide, une vertu et un puritanisme outrés, elle se glissa insidieusement dans les conseils des puissances européennes, rampa sournoisement jusqu’aux trônes des souverains, se fit, sous le masque du désintéressement, accepter par eux. Tout à coup, lorsque le moment favorable fut arrivé, les États-Unis d’Amérique se redressèrent et se cambrèrent fièrement, eux qui avaient posé en principe dans leur acte d’indépendance qu’ils ne consentiraient jamais à un agrandissement quelconque, et dirent d’une voix hautaine à l’Europe surprise, presque épouvantée de tant d’audace : « Le quart du globe est à nous ; nous