Page:Aimard - La Fièvre d’or, 1860.djvu/200

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
193
LA FIÈVRE D’OR.

l’autre, dix-huit piastres à San-Francisco, et que je ne puis le vendre vingt-cinq ici.

— Bah ! bah ! j’ai la prétention de me connaître en ganado aussi bien que qui que ce soit, et si je vous offre ce prix de votre troupeau c’est qu’il le vaut.

— Non, général, il ne le vaut pas, vous le savez aussi bien que moi, dit résolûment le chasseur ; je vous remercie de votre générosité, mais je ne puis l’accepter, mon ami m’en voudrait d’avoir fait un tel marché.

— Ainsi, vous refusez ?

— Je refuse.

— Voilà qui est étrange et ne s’est jamais vu, un marchand refuser de gagner sur sa marchandise.

— Pardonnez-moi, général, je ne refuse pas de faire un bénéfice honnête, je ne veux pas vous voler, voilà tout.

— Sur ma parole, vous êtes le premier que je vois comprendre le commerce de cette façon.

— C’est que probablement, général, vous n’avez jamais fait d’affaires avec les Français.

— Il faut en passer par où vous voulez. Combien demandez-vous de vos bêtes ?

— Dix-neuf piastres par tête, ce qui, je vous le jure, me donne encore un fort beau bénéfice.

— Soit ! cela fait ?…

— Quatorze mille six cent trente piastres.

— Très-bien ! Si cela vous convient, je vous donnerai une lettre de change de pareille somme sur la maison Toribi, Dellaporta et Co, de Guaymas.

— Parfaitement.

— Vous entendez, capitaine, le troupeau est à nous.