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LA FIÈVRE D’OR.

dormi cette nuit, rien n’a troublé mon sommeil.

— Voyez-vous cela, la petite dissimulée.

— Seulement, hier au soir, j’ai entendu résonner une jarana accompagnant le romance del rey Rodrigo ; je me suis souvenue de notre ancien compagnon de voyage, qui ne chantait jamais autre chose. Je ne sais comment cela s’est fait, mais je me suis persuadée que c’était lui qui chantait en ce moment dans la patio du meson, je l’ai envoyé prier de venir me trouver par Violanta. Alors…

— Alors, il vous a tout dit ?

— Oui, mon père, comme je savais le désir que vous éprouviez de connaître votre libérateur, je voulais vous surprendre en vous le faisant trouver au moment où vous vous y attendiez le moins ; malheureusement le hasard s’est jeté à la traverse de mes projets et est venu renverser toutes mes combinaisons.

— C’est bien fait pour vous, Niña, cela vous apprendra à avoir des secrets pour votre père ; mais console-toi, mon enfant, nous le retrouverons, et alors il faudra bien qu’il nous laisse lui exprimer notre reconnaissance, que le temps, loin de diminuer, n’a fait que rendre plus vive.

La jeune fille, sans répondre, alla toute pensive se rasseoir.

Le général se tourna vers Valentin :

— À nous deux, caballero, lui dit-il. Vous êtes propriétaire du troupeau de bêtes à cornes que vous conduisez ?

— Oui, général ; seulement je ne suis pas seul.

— Quels sont vos associés ?

— Don Luis et le caballero ici présent.