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LA FIÈVRE D’OR.

parce que don Luis, ignorant, général, qu’il aurait ce matin même, l’honneur d’être reçu par Votre Excellence, est parti au lever du soleil, à franc étrier, pour San-Francisco.

Doña Angela devint pâle comme une morte et fut sur le point de s’évanouir à cette nouvelle ; cependant elle surmonta l’émotion qu’elle éprouvait et redevint calme en apparence ; elle voulait tout savoir.

Cette émotion, quelque passagère qu’en eût été la durée, n’avait pas échappé à Valentin. Le général tournait à peu près le dos à sa fille, il était donc impossible qu’il s’aperçût de quoi que ce fût.

— C’est fâcheux, répondit-il.

— Vous m’en voyez désespéré, général.

— Son absence sera de courte durée, sans doute ?

— Il ne reviendra pas.

Valentin prononça ces paroles sèchement.

L’émotion qu’éprouva doña Angela fut si vive qu’elle ne put retenir un léger cri de douleur.

— Qu’avez-vous donc, Niña ? lui demanda son père en se retournant brusquement, que signifie ce cri ?

— Je me suis coupée, répondit-elle de l’air le plus naïvement innocent qu’il fut possible.

— Oh ! oh ! s’écria le père avec inquiétude, dangereusement ?

— Non, une égratignure à peine ; pardonnez-moi, mon père, je suis une sotte.

Le général n’en demanda pas davantage, et reprit son entretien avec le Français.

— Je suis contrarié de ce contre-temps, dit-il, j’avais à entretenir votre ami d’une affaire fort sérieuse.

— Qu’à cela ne tienne ! me voilà ; mon ami, en