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LA FIÈVRE D’OR.

heure pour heure, après la mort de sa femme, dont le nom fut le dernier mot qui erra sur ses lèvres pâlies en rendant le dernier soupir.

Don Sébastian âgé de vingt ans à peine, demeura donc orphelin ; seul, sans parents, sans amis, le jeune homme se renferma dans son hacienda, où il pleura silencieusement les deux êtres qu’il avait perdus et sur lesquels il avait concentré toutes ses affections.

Don Sébastian serait peut-être demeuré de longues années ainsi, retiré dans ses propriétés, sans voir le monde et sans songer à s’occuper de la façon dont il allait, menant la vie nonchalante, paresseuse et abrutissante des grands propriétaires qu’aucune idée d’amélioration ou de progrès ne pousse à s’occuper de leurs terres, timide et craintif comme tous les individus qui vivent seuls, employant les journées à chasser ou à dormir, si le hasard ou plutôt sa bonne étoile n’avait pris le soin d’amener au Palmar un vieux chef de partisans qui longtemps avait guerroyé avec don Eustaquio, et qui, passant à quelques lieues de là, avait senti se réveiller en lui d’anciens souvenirs et s’était dérangé de sa route afin de venir serrer la main de son vieux compagnon, dont il ignorait la mort.

Cet homme se nommait don Isidro Vargas. Il était de haute taille ; ses épaules étaient larges, ses membres athlétiques et ses traits empreints d’une énergie peu commune ; en résumé, il offrait dans toute sa personne le type de cette race forte et dévouée qui se perd tous les jours au Mexique, et dont il ne restera plus bientôt un seul rejeton.

L’arrivée inopinée de cet hôte, dont les lourds