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LA FIÈVRE D’OR.

— Figurez-vous que don Luis, après m’avoir guéri de mes blessures, s’est, épris pour moi d’une de ces franches et loyales amitiés de chasseurs qui n’ont pas de pendant dans la vie des villes ; non-seulement il ne voulut pas consentir à ce que je le quittasse, mais, sachant que par suite de revers, trop longs à vous rapporter, je me trouvais à peu près sans ressources, il exigea que j’entrasse, bien que n’apportant aucune espèce d’apport social, dans toutes les opérations qu’il lui plairait de tenter ; si bien que sans avoir rien déboursé, je suis de moitié dans la propriété ; de façon, vous le comprenez, que je ne puis rien traiter ni faire sans avoir au préalable pris ses instructions.

— Ceci est on ne peut pas plus juste, il me semble.

— Et à moi aussi, madame ; voilà pourquoi, malgré le vif désir que j’aurais de terminer cette affaire séance tenante avec vous, je suis dans l’impossibilité de le faire.

Dona Angela sembla réfléchir un instant, puis elle reprit avec un vif battement de cœur et un tremblement dans la voix qu’elle ne put complétement dissimuler, malgré tous ses efforts :

— Mais ceci, à mon avis, est la chose la plus simple du monde et peut s’arranger très-facilement.

— Je ne demande pas mieux ; seulement je vous avoue à ma honte que je ne vois pas trop quel moyen je pourrai employer.

— C’est la moindre des choses : demain, avant l’arrivée du mayordomo, je causerai avec mon père ; il sera, je n’en doute pas, charmé d’être agréable à