Page:Aimard - L’Éclaireur, 1860.djvu/84

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
74
L’ÉCLAIREUR.

criant, hurlant et brandissant des armes de toutes sortes. Mais avant qu’elle eût jeté un cri, don Torribio s’élança vers elle.

— Point de bruit, dit-il, nous ne voulons pas vous faire du mal ; nous venons, au contraire, réparer celui que vous avez fait.

Muettes de terreur à la vue de tant d’hommes masqués, les femmes étaient restées comme pétrifiées.

— Que voulez-vous de moi ? balbutia la supérieure d’une voix tremblante.

— Vous allez le savoir, répondit le chef ; et se tournant vers un de ses hommes : Les mèches souffrées, dit-il.

Un bandit lui apporta silencieusement ce qu’il demandait.

— Maintenant, écoutez-moi avec attention, señora. Hier une novice de votre couvent qui, il y a quelques jours, avait refusé de prendre le voile, est morte subitement.

La supérieure promena un regard de commandement autour d’elle, puis s’adressant à l’homme qui lui parlait :

— Je ne sais ce que vous voulez dire, répondit-elle avec assurance.

— Fort bien, je m’attendais, à cette réponse. Je continue : cette novice, âgée à peine de seize ans, se nommait Doña Laura de Azevedo y Real del Monte ; elle appartenait à l’une des premières familles de la République ; ce matin ses obsèques ont eu lieu avec tout le cérémonial usité en pareil cas, dans l’église même de ce couvent ; puis son corps a été descendu en grande pompe dans les caveaux réservés à la sépulture des religieuses.

Il s’arrêta en fixant à travers son masque sur la supérieure des yeux qui lançaient des éclairs.

— Je vous répète que je ne sais ce que vous voulez dire, répondit-elle froidement.

— Ah ! fort bien, écoutez encore ceci, señora, et faites-en