jeune folle que sa résistance contre notre volonté souveraine a brisée comme un faible roseau et qui est morte ce matin.
— Croyez-vous donc qu’elle soit morte, ma mère ? répondit la jeune fille timidement et d’une voix entre-coupée par la douleur.
— Qui en doute ? s’écria l’abbesse avec éclat, en se levant à demi sur son fauteuil et en fixant un regard de vipère sur la pauvre enfant.
— Personne ! madame, personne ! s’écria-t-elle en se reculant avec terreur.
— N’avez-vous pas, comme les autres membres de la communauté, continua l’abbesse avec un accent terrible, assisté à son convoi ? N’avez-vous pas entendu les prières prononcées sur son cercueil ?
— C’est vrai ! ma mère.
— N’avez-vous pas vu descendre son corps dans les caveaux du couvent et sceller au-dessus la pierre tumulaire que l’ange de la justice divine doit seul soulever au jugement dernier ? Dites, n’avez-vous pas assisté à cette cérémonie triste et terrible ! Oseriez-vous soutenir que tout ne s’est pas passé ainsi et qu’elle est vivante, encore, cette misérable créature que Dieu a subitement frappée dans sa colère, pour qu’elle servit d’exemple à ceux que Satan pousse à la révolte.
— Pardon ! ma sainte mère, pardon, j’ai vu ce que vous dites, j’ai assisté à l’enterrement de doña Laura ; hélas ! le doute n’est point possible, elle est bien morte.
En prononçant ces dernières paroles, la jeune fille ne put retenir ses larmes, qui coulèrent abondamment.
L’abbesse la regarda d’un air soupçonneux :
— C’est bien, reprit-elle, retirez-vous ; mais, je vous le répète, prenez garde ; je sais que, vous aussi, un esprit de révolte s’est emparé de votre cœur, je vous surveillerai.