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L’ÉCLAIREUR.

soldat d’un ton de commandement, en se plaçant de façon à ce que les rayons de la lune tombassent sur son visage.

L’homme se recula en poussant une exclamation de surprise.

— Valgame Dios ! señor don Torribio, s’écria-t-il avec l’accent d’un profond respect, qui aurait reconnu votre seigneurie sous ce misérable accoutrement ? Entrez, entrez, ils vous attendent avec impatience.

Et cet homme, devenu aussi obséquieux qu’il était insolent quelques minutes auparavant, se hâtait de détacher la chaîne afin d’ouvrir la porte toute grande.

— C’est inutile, Pepito, reprit le soldat ; je te répète que je n’entrerai pas : combien sont-ils ?

— Vingt, seigneurie.

— Armés ?

— Complètement.

— Qu’ils descendent à l’instant, je les attends ici ; va, mon fils, le temps presse.

— Et vous ? seigneurie.

— Moi, tu m’apporteras un chapeau, une esclavina, mon épée et mes pistolets ; allons, dépêche.

Pepito ne se fit pas répéter cet ordre ; laissant la porte ouverte, il s’éloigna en courant.

Quelques minutes plus tard, une vingtaine de bandits armés jusqu’aux dents firent irruption dans la rue en se bousculant les uns les autres. Arrivés auprès du soldat, ils le saluèrent respectueusement, et, sur un signe de lui, ils demeurèrent immobiles et silencieux.

Pépé avait apporté les objets demandés par celui que l’évangelista avait nommé don Annibal, que lui appelait don Torribio et qui, probablement, portait encore d’autres noms, mais auquel nous conserverons provisoirement le dernier.

— Les chevaux sont-ils prêts ? demanda don Torribio,