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L’ÉCLAIREUR.

— Je le sais, c’est une bonne créature ; mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit pour le moment : que comptez-vous faire ?

— Attendre l’instant favorable, pousser mon cri de guerre, et tomber sur ces chiens.

— Hum ! Votre projet est un peu vif ; si vous me le permettez, j’y changerai quelque chose.

— La sagesse parle par la bouche du chasseur pâle ; l’Aigle-Volant est jeune ; il lui obéira.

— Bon, d’autant plus que je n’agirai que dans votre intérêt ; maintenant, laissez-moi écouter, la conversation me semble prendre une tournure fort intéressante pour nous.

L’Indien s’inclina sans répondre, Balle-Franche se pencha en avant pour mieux entendre ce qui se disait.

Au bout de quelques minutes le chasseur jugea probablement qu’il était temps d’intervenir, car il se tourna vers le chef, et lui parlant oreille à oreille ainsi qu’il avait fait pendant tout leur colloque précédent :

— Que mon frère me laisse mener cette affaire, dit-il ; sa présence nous serait plus nuisible qu’utile ; nous ne pouvons avoir la prétention de combattre un aussi grand nombre d’ennemis, la prudence exige que nous ayons recours à la ruse.

— Les Apaches sont des chiens, murmura le Comanche avec colère.

— Je suis de votre avis ; mais, quant à présent, feignons de ne pas les considérer comme tels. Croyez-moi, nous prendrons bientôt notre revanche ; d’ailleurs l’avantage nous reste, puisque nous les trompons.

L’Aigle-Volant baissa tête.

— Le chef me promet-il de ne pas faire un geste sans un signal de moi ? reprit le chasseur avec insistance.

— L’Aigle-Volant est un sachem, il a dit qu’il obéirait à la Tête-Grise.