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L’ÉCLAIREUR.

L’amantzin se préparait à se rendre au temple au moment où le chasseur entrait dans le palais, Atoyac, curieux comme un véritable Indien qu’il était, n’avait pas, depuis la veille, quitté le grand-prêtre, afin d’assister à la seconde visite du médecin, visite qui, d’après ce qu’il avait vu déjà à la première, devait, dans sa pensée, être fort intéressante. Le chasseur retourna, accompagné de l’amantzin qui ne le quittait pas plus que son ombre, auprès des jeunes filles. Il acquit alors la certitude que doña Laura pouvait sans inconvénient supporter la fatigue d’un transport hors du palais des vierges du Soleil. La jeune fille, avec l’espoir d’une prompte délivrance, avait repris des forces, le mal qui la minait sourdement avait disparu comme par enchantement. Quant à Luisa, plus défiante, lorsque le grand-prêtre se fut retiré, car le chasseur avait exigé de demeurer seul avec les malades, elle dit au Canadien :

— Nous serons prêtes, quant vous l’ordonnerez, à vous suivre, Bon-Affût, mais à une condition.

— Comment ! à une condition ? se récria le chasseur. Puis il ajouta mentalement : Qu’est-ce que cela signifie ? Rencontrerai-je donc des obstacles de tous les côtés ? Parlez, niña, reprit-il, je vous écoute.

— Pardonnez-moi ce que mes paroles auront de dur en apparence ; nous ne doutons pas de votre loyauté, Dieu nous en garde ! cependant…

— Vous vous méfiez de moi, interrompit le chasseur d’une voix chagrine. Du reste, je devais m’y attendre, vous me connaissez trop peu l’une et l’autre pour avoir foi en moi.

— Hélas ! dit doña Laura, tel est le malheur de notre position que, malgré nous, nous tremblons de rencontrer partout des traîtres.