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L’ÉCLAIREUR.

— Cela est inutile ; je sais que mon frère est un grand guerrier blanc ; mes oreilles sont ouvertes, j’attends l’explication qu’il veut me donner.

Le chasseur haussa les épaules avec mépris.

— Les Apaches sont-ils donc devenus des coyotes lâches et pillards, qui se mettent en troupes pour chasser dans la Prairie ? Pourquoi m’ont-ils attaqué ?

— Mon frère le sait.

— Non, puisque je le demande. Les Apaches Antilopes avaient pour chef un grand guerrier, nommé le Loup-Rouge ; ce chef était mon ami, j’avais fait avec lui un traité ; mais le Loup-Rouge est mort, sans doute, sa chevelure orne la hutte d’un Comanche, puisque les jeunes gens de sa tribu sont venus m’attaquer, contre la paix jurée, traîtreusement, pendant mon sommeil.

Le chef se redressa en fronçant les sourcils.

— Le visage pâle a comme tous ces compatriotes une langue de vipère, dit-il rudement ; une peau couvre son cœur, et les paroles que souffle sa poitrine sont autant de perfidies ; le Loup-Rouge n’est pas mort, sa chevelure n’orne pas la hutte d’un chien comanche, il est toujours le premier sachem des Apaches Antilopes, le chasseur le sait bien, puisqu’il lui parle en ce moment.

— Je suis heureux que mon frère se soit nommé, répondit le chasseur, je ne l’aurais pas reconnu à sa façon d’agir.

— Oui, il y a un traître entre nous, reprit sèchement le chef ; mais ce traître est un visage pâle, et non pas un Indien !

— J’attends que mon frère s’explique, je ne le comprends pas, un brouillard s’est étendu sur mes yeux, mon esprit est voilé ; les paroles du chef dissiperont, je n’en doute pas, ce nuage.

— Je le désire ! Que le chasseur réponde avec une langue