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L’ÉCLAIREUR.

Ils firent un dernier adieu à leurs compagnons, et s’enfoncèrent résolument dans les hautes herbes au milieu desquelles ils ne tardèrent pas à disparaître.

Heureusement pour les aventuriers, auxquels il aurait été impossible de se diriger au milieu des ténèbres, les pas des piétons et ceux des cavalière qui se rendaient incessamment à la ville, ou de ceux qui en sortaient, avaient tracé à la longue de larges sentiers qui tous aboutissaient directement à une des portes.

Les deux hommes marchèrent assez longtemps silencieux à côté l’un de l’autre.

Chacun d’eux réfléchissait profondément àl’issue probable de cette tentative désespérée.

Dans le premier moment d’enthousiasme, ils n’avaient que légèrement songé aux difficultés sans nombre qu’ils devaient rencontrer sur leur route et aux obstacles qui, à chaque pas, surgiraient sans doute devant eux.

Ils n’avaient vu que le but à atteindre.

Mais maintenant qu’ils étaient de sang-froid, bien des choses auxquelles ils n’avaient pas pris garde ou auxquelles ils n’avaient pus voulu s’arrêter se présentaient à leur pensée, et, ainsi que cela arrive souvent, leur faisaient voir leur expédition sous un aspect tout différent.

Maintenant, le but leur paraissait presque impossible à atteindre, au lieu que les dangers et les obstacles grossissaient pour ainsi dire à vue d’œil.

Malheureusement, ces judicieuses réflexions arrivaient trop tard ; il n’était plus temps de reculer, il fallait marcher en avant quand même.

Du reste, tout était calme et tranquille ; il n’y avait pas un soupir de la brise dans l’air, pas un bruit dans la prairie, et au fur et à mesure que les étoiles apparaissaient au ciel, une lueur pâle et tremblotante venait légèrement modifier les ténèbres et les rendre moins intenses.