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L’ÉCLAIREUR.

ce qui aurait pu le compromettre, et n’y laissa que sa trousse de voyage et une petite boîte à médicaments qu’il portait toujours avec lui, bagage précieux auquel il avait eu recours dans mainte occasion. Il ferma les alforjas, les jeta sur son dos, et se tournant vers le chef :

— Je suis prêt, lui dit-il.

— Bon ; l’Églantine et moi nous irons en avant, afin de faciliter la route à mon frère.

Le chasseur fit un signe d’assentiment.

L’Indien appela sa femme : tous deux, après avoir pris congé des aventuriers, s’éloignèrent.

Aussitôt que le chef eut disparu, le chasseur fit à son tour ses adieux à ses amis. C’était peut-être la dernière fois qu’il les voyait. Qui pouvait prévoir le sort qui lui était réservé au milieu des Indiens farouches aux mains desquels il allait se livrer sans défense ?

— Je vous accompagnerai jusqu’à la lisière de la forêt, lui dit don Miguel, afin de bien me rendre compte des moyens que je pourrai employer afin d’être à portée d’accourir à votre premier signal.

— Venez, lui dit laconiquement le chasseur.

Ils partirent suivis par les vœux de tous leurs compagnons, qui voyaient s’éloigner Bon-Affût avec un sentiment de tristesse et une anxiété inexprimable.

Les deux hommes marchaient côte à côte sans échanger une parole ; le Canadien était plongé dans de profondes réflexions ; don Miguel, lui, semblait en proie à une émotion dont il ne parvenait pas à se rendre maître. Il arrivèrent ainsi jusqu’aux derniers arbres de la forêt.

Le chasseur s’arrêta.

— C’est ici que nous devons nous quitter, dit-il à son compagnon.

— C’est vrai, murmura le jeune homme, en jetant un regard triste autour de lui. Et il se tut.