Page:Aimard - L’Éclaireur, 1860.djvu/316

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
306
L’ÉCLAIREUR.

Bermudez fit ses derniers adieux, puis se détournant avec effort, il sauta dans la pirogue, saisit les pagaies et s’éloigna.

— Au revoir ! lui cria don Mariano d’une voix émue.

— À bientôt, si Dieu veut, répondit Bermudez.

— Amen ! murmurèrent pieusement les aventuriers.

Bon-Affût suivit longtemps des yeux la marche de la pirogue, puis se retournant par un mouvement brusque vers ses compagnons :

— C’est un cœur dévoué, murmura-t-il, comme se parlant à lui-même : arrivera-t-il ?

— Dieu le protégera, répondit don Mariano.

— C’est vrai, reprit le chasseur en passant sa main sur son front ; je suis fou, sur ma parole, d’avoir de telles pensées, et ingrat, qui plus est, ingrat envers la Providence, qui a veillé sur nous jusqu’ici avec une si grande sollicitude.

— Bien parlé, mon ami, fit don Mariano ; j’ai le pressentiment que nous réussirons.

— Eh bien, voulez-vous que je vous parle franchement, fit gaiement le chasseur ; moi aussi, f en ai le pressentiment ; ainsi, en avant.

L’Aigle-Volant posa alors sa main sur l’épaule du chasseur.

— Avant que de partir, je voudrais tenir conseil avec mon frère, dit-il ; le cas est grave.

— Vous avez raison, chef, rentrons dans la grotte ; nos mouvements doivent être combinés avec la plus grande prudence, afin, le moment venu, de ne pas commettre une irréparable bévue qui compromettrait sans retour le succès de notre expédition.

Le Comanche fit un signe d’assentiment, et précédant ses amis, il retourna à la caverne. Le feu n’était pas complètement éteint, il couvait sous la cendre ; en un instant