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L’ÉCLAIREUR.

qui lui a été inutile jusqu’à présent lui servira-t-il plus, tard.

— Écoutez, Peau-Rouge, fit don Estevan, croyez-moi, ne luttons pas de finesse, soyons francs l’un vis-à-vis de l’autre ; vous savez de mes affaires beaucoup plus que je n’aurais voulu vous en laisser deviner ; comment l’avez-vous appris, peu m’importe ; seulement, si je vous connais bien, vous avez une proposition à me faire, proposition que sans doute, d’après la position dans laquelle je me trouve, vous pensez que j’accepterai ; faites donc cette proposition clairement, nettement, ainsi qu’un homme doit le faire, et finissons-en, au lieu de perdre un temps précieux en vains discours et en circonlocutions inutiles.

Addick sourit sournoisement.

— Mon frère parle bien, dit-il d’un ton mielleux, sa sagesse est grande ; je serai franc avec lui ; il a besoin de moi, je veux le servir.

— Voto a brios ! voilà qui est parler en homme ; ceci me plaît ; continuez, chef, si la fin de votre discours ressemble au commencement, je ne doute pas que nous nous entendions.

— Ooah ? j’en suis convaincu ; mais, avant de nous asseoir au foyer du conseil, mon frère a besoin de reprendre ses forces affaiblies par un long jeûne et de grandes fatigues. Les guerriers du Loup-Rouge sont campés ici près sous le couvert ; que mon frère me suive ; lorsqu’il aura pris un peu de nourriture, nous terminerons notre affaire.

— Soit, marchez, je vous suis, répondit don Estevan.

Les trois hommes s’éloignèrent alors dans la direction du camp des Peaux-Rouges, établi en effet à une centaine de pas au plus de l’endroit qu’ils venaient de quitter.

Les Indiens, mieux que tout autre peuple, les Arabes exceptés, entendent les lois de l’hospitalité, cette vertu des races nomades ignorée dans les villes où elle est, à la