parlez, je vous écoute attentivement, reprit don Mariano, qui ne se souciait nullement de voir la conversation se continuer sur ce sujet.
— Donnez-moi mon vrai nom, don Mariano, répondit le jeune homme ; ce nom vous inspirera peut-être quelque confiance en moi : je ne suis ni don Torribio Carvajal ni don Miguel Ortega, je me nomme don Leo de Torrès.
— Leo de Torrès ! s’écria don Mariano en se levant avec stupéfaction, le fils de mon ami le plus cher !
— C’est moi répondit simplement le jeune homme.
— Mais non, cela n’est pas possible. Basilio de Torrès est mort massacré avec toute sa famille par les Indiens Apaches sur les ruines fumantes de son hacienda prise d’assaut, il y a vingt ans de cela.
— Je suis le fils de don Basilio de Torrès, reprit l’aventurier. Regardez-moi bien, don Mariano : est-ce que les traits de mon visage ne vous rappellent rien.
Le gentilhomme s’approcha, posa les mains sur les épaules de l’aventurier, et l’examina quelques secondes avec la plus profonde attention.
— C’est vrai, dit-il au bout d’un instant avec des larmes dans la voix, cette ressemblance est extraordinaire. Oui, oui, s’écria-t-il avec explosion, je vous reconnais maintenant !
— Oh ! reprit le jeune homme avec un sourire, j’ai entre les mains des actes qui garantissent mon identité. Mais, fit-il, ce n’est plus de cela qu’il s’agit, revenons à ce que je voulais vous dire.
— Comment se fait-il que, depuis l’affreuse catastrophe qui vous a rendu orphelin, jamais je n’aie entendu parler de vous, moi le meilleur ami, presque le frère de votre père ; j’aurais été si heureux de veiller sur vous.
Don Leo, auquel désormais nous restituerons son véritable nom, fronça le sourcil ; son front fut sillonné de rides