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L’ÉCLAIREUR.

— Bermudez a raison, seigneurie, ajouta sentencieusement Juanito, homme méthodique et silencieux, qui ne prenait la parole que dans les grandes circonstances, vous devez le laisser agir à sa guise.

— Non, répondit résolument don Mariano ; je ne consentirai jamais à cela. Dieu est le maître de notre existence, lui seul peut en disposer à son gré ; s’il t’arrivait quelque chose de fâcheux, mon pauvre Bermudez, je ne me le pardonnerais pas ; nous continuerons à avancer tous trois ensemble ; au moins, si ce sont des ennemis qui sont devant nous, nous pourrons nous défendre.

Bermudez et Juanito se disposaient à prendre la parole pour répondre à leur maître, et il est probable que la discussion se serait prolongée longtemps encore, mais en ce moment le galop d’un cheval se fit entendre, les herbes s’écartèrent, et un cavalier apparut à une dizaine de pas du groupe environ. Ce cavalier était blanc, il portait le costume des chasseurs de la Prairie.

— Holà ! caballeros, cria-t-il en faisant un geste amical de la main et en arrêtant son cheval, avancez sans crainte et soyez les bienvenus ; j’ai reconnu votre indécision, je suis venu pour y mettre un terme.

Les trois hommes échangèrent un regard.

— Venez, venez, reprit le chasseur, nous sommes des amis, je vous le répète, vous n’avez rien à redouter de nous.

— Je vous remercie de votre cordiale invitation, répondit enfin don Mariano, et je l’accepte de grand cœur.

Puis toute défiance étant éteinte entre eux, les quatre personnages s’avancèrent de compagnie vers le feu qu’ils atteignirent au bout de quelques minutes.

Auprès de ce feu se tenaient deux personnes, un Indien et sa femme.