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L’ÉCLAIREUR.

un pays accidenté, coupé de rivières peu profondes, parsemé de hautes futaies et de bouquets de cotonniers, peuplés par une infinité d’oiseaux de toutes sortes et de toutes couleurs ; à l’horizon une longue ligne jaunâtre, au-dessus de laquelle planait un épais nuage de vapeurs, indiquait le rio Colorado grande del Norte.

Ainsi que don Miguel l’avait prévu, on atteignit le gué del Rubio quelques minutes avant le coucher du soleil.

Nous expliquerons ici en quelques mots de quelle façon campent les caravanes dans le désert ; cette description est indispensable pour que le lecteur puisse comprendre comment il est facile de sortir et de rentrer dans le camp sans être aperçu.

La cuadrilla, en sus de ses mules de charge, conduisait avec elle une quinzaine de wagons chargés de marchandises ; lorsque l’endroit du campement était choisi, les quinze wagons étaient disposés en carré à la distance de trente-cinq pieds l’un de l’autre ; dans les intervalles étaient placés six ou huit hommes qui allumaient un feu autour duquel ils se groupaient pour cuisiner, manger, causer et dormir. Les chevaux étaient placés au centre du carré, non loin de la tente mystérieuse qui marquait juste le milieu du camp. Chaque cheval avait le pied hors montoir avec le pied correspondant de derrière attachés à une corde longue de vingt pouces. Nous ferons remarquer que bien qu’un cheval entravé de cette façon se trouve d’abord fort gêné, bientôt il s’accoutume suffisamment pour pouvoir marcher lentement. Du reste, cette mesure toute de prudence est prise afin que les bêtes ne s’éloignent pas et ne soient point enlevées par les Indiens. Deux chevaux sont toujours entravés ensemble, un qui a les pieds attachés, et l’autre retenu seulement par une longe, et qui en cas d’alarme piaffe et galope