Page:Aimard - Curumilla, 1860.djvu/343

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Arrivé sur le lieu de l’exécution, il s’arrêta, se tourna du côté du peloton chargé de son exécution, jeta son chapeau à terre et attendit.

Un officier lut la sentence.

Lorsque cette lecture fut finie, le comte embrassa affectueusement le missionnaire, en fit autant de Valentin, et se penchant à son oreille :

— Souviens-toi ! lui dit-il.

— Oui ! répondit celui-ci d’une voix inarticulée.

Alors ce fut le tour de doña Angola. Ils demeurèrent longtemps embrassés ; enfin, comme par un commun accord, ils se séparèrent.

— Séparés sur la terre, bientôt nous serons unis au ciel. Courage, mon bien-aimé ! lui dit-elle avec exaltation.

Il lui répondit par un sourire qui déjà n’avait plus rien de la terre.

Le père Séraphin et Valentin s’éloignèrent d’une quinzaine de pas, s’agenouillèrent sur la terre, et joignant les mains, ils prièrent avec ferveur.

Doña Angela, son capuchon toujours rabattu, alla se placer à quelques pas seulement du général, qui suivait tous les préparatifs de l’exécution avec un sourire de triomphe.

Le comte jeta un regard autour de lui afin de s’assurer que ses amis s’étaient éloignés, fit un pas en avant afin de se rapprocher du peloton dont il n’était cependant qu’à sept ou huit pas, et croisant ses mains derrière le dos, la tête droite, le regard assuré et le sourire sur les lèvres.

— Allons, mes braves, dit-il d’une voix claire et accentuée, faites votre devoir, visez au cœur !

Alors il se passa une chose étrange : l’officier